Créer des logements sans artificialiser les sols ? C’est possible !

Créer des logements sans artificialiser les sols ? C’est possible !

Le projet de transformation de l’ancien site de la Croix-Rouge, rue de Stalle à Uccle, en est un bon exemple : dans les grandes lignes, il consiste à maintenir le bâtiment existant (anciennement occupé par des bureaux), pour le convertir principalement en logements, et à construire deux nouveaux immeubles, eux aussi majoritairement dédiés à cette fonction. Au total, les 6.354 m² de bureaux actuellement recensés seront réduits à 619 m² tandis que les 68 logements prévus occuperont 7.740 m².

Ce type de projet de conversion de bureaux en logements n’a rien d’exceptionnel : entre 1997 et 2022, près de 1.250.000 m² de logements ont été créés à partir de bureaux vides. Mais là où le projet de transformation de l’ancien site de la Croix-Rouge est intéressant, c’est qu’il ne repose pas sur le principe d’une démolition-reconstruction d’immeubles existants, comme c’est hélas bien trop souvent le cas ; on pense aux projets The Dome (ancien siège d’Actiris) et Brouck’R le long du piétonnier, Lebeau au Sablon, CCN dans le quartier Nord ou encore aux multiples opérations de ce type en deuxième couronne (du côté de la rue Colonel Bourg ou sur le site de l’ancien siège de Bruxelles Environnement à Woluwe-Saint-Lambert) : les exemples ne manquent malheureusement pas… Les démolitions du projet de transformation de l’ancien site de la Croix-Rouge se limitent à un parking en ouvrage en intérieur d’îlot, qui laissera place à un des deux nouveaux immeubles prévus, l’autre s’implantant sur un parking à ciel ouvert, ce qui permet, malgré une augmentation de la densité totale sur le site (qui reste toutefois très raisonnable), de libérer de l’espace au sol. Le taux d’emprise (espace occupé au sol par les constructions) passera ainsi de 34 à 29 % et le taux d’imperméabilisation de 56 à 49 %. La transformation de ces deux parkings est un bon exemple du potentiel de conversion de ces espaces de stationnement hors voirie en d’autres fonctions bien plus urbaines, comme des logements et/ou des espaces verts. A l’échelle de la Région, on comptait, en 2013, pas moins de 2,2 millions de mètres carrés de parkings à l’air libre, soit deux fois la superficie de la commune de Saint-Josse ! Un potentiel à mieux exploiter à Bruxelles, au côté de celui que constitue le million de mètres carrés de bureaux vides.

Ces points positifs ne doivent toutefois pas faire oublier les deux principaux défauts du projet. Si le parking en ouvrage et le parking à ciel ouvert « disparaissent », le nombre de places de stationnement n’est pourtant réduit que de 20 %, de 100 à 80 emplacements (qui sont pour la plupart « cachés » en sous-sol), ce qui reste trop peu ambitieux, d’autant plus que le site est desservi par la ligne 4, entièrement en site propre, où circulent des trams de grande capacité, à des fréquences élevées, qui permettent de rejoindre le centre-ville en un trajet direct d’une vingtaine de minutes. L’autre défaut, bien plus grave, est qu’aucun logement abordable n’est prévu sur le site alors même que le quartier (Globe) au sein duquel le projet s’implante ne compte aucun logement social ! Le dossier de demande de permis ne mentionne pas les prix de vente des futurs logements mais une étude, réalisée par Idea Consult en 2023 pour le compte de la Région, évaluait le prix moyen dans le quartier à plus de 4.500 €/m², ce qui dépasse largement les capacités financières de la grande majorité des ménages bruxellois…

Pour faire passer la transformation de l’ancien site de la Croix-Rouge du stade de relativement bon projet à celui de très bon projet, la Région devra conditionner la délivrance d’un éventuel permis à la réduction du nombre d’emplacements de parking et surtout à l’imposition d’une part significative de logements abordables (en particulier sociaux). Pour rappel, deux projets de textes législatif allant dans ce sens (projet de modification de l’arrêté relatif aux charges d’urbanisme et projet d’ordonnance visant à instaurer un quota de logements publics dans les grands projets immobiliers) étaient sur la table du gouvernement début 2024 : rien n’empêche les autorités régionales de s’en inspirer pour imposer des conditions à la délivrance d’un permis !

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